- Auteur : Thomas Fecchio
- Ma note :
- Lu : octobre 2017
Six heures du matin. Des hommes armés déboulent dans la chambre de Jean Boyer. Dans un état de semi-conscience, le quinquagénaire a le temps d’apercevoir leurs brassards siglés « police ». Mauvais signe, surtout pour lui, ex-taulard relâché après trente ans passés derrière les barreaux. Ses crimes ? Meurtre et viols à répétition. Ce jour-là, c’est le capitaine Germain qui lui passe les menottes. Le cadavre de Marianne Locart, une étudiante originaire de Soissons, a été retrouvé enterré près du domicile du suspect, un bras sortant de terre. La première victime de Boyer avait subi le même sort. Pour la Justice, pour les médias et pour les politiques, le récidiviste devient le suspect idéal. Pourtant, Germain doute de la culpabilité de l’interpellé qui ne cesse de répéter « Je suis innocent ». Mais l’engrenage est enclenché. À ce stade, Boyer n’a plus qu’une solution pour s’en sortir : débusquer le meurtrier de Marianne.
mon avis
Voici un tout premier roman qui m’a agréablement surprise. L’idée de départ de Je suis innocent est particulièrement originale et risquée. Mettre en scène et au premier plan un violeur récidiviste accusé, selon lui, à tort, est on ne peut plus osé. J’avoue que sans la 4e de couverture et la proposition de l’auteur je ne me serais jamais arrêtée devant ce roman. Le titre passe-partout, la couverture mal fichue, et le tout associé à un nom de collection me rappelant son équivalent sudiste de mon (si peu regretté) ancien boulot, je crois que de prime abord pas grand-chose n’aurait trouvé grâce à mes yeux. Mais l’auteur a eu la bonne idée de me contacter. Et je me félicite d’avoir succombé à la quatrième de couverture !
Alors ?
Sous ses dehors peu attrayants ce roman constitue pourtant une petite pépite en son genre. L’auteur nous balance un violeur tout juste sorti de prison, qui a passé trente ans à réfreiner ses ardeurs. C’est long. On trouve près de chez lui le cadavre d’une étudiante violée et martyrisée. À ce stade la boucle est déjà bouclée pour le capitaine Germain, mais le suspect clame son innocence, et malgré son profil idéal et son passé chargé, Germain va commencer à douter.
L’art du doute
Le doute est ici omniprésent, les deux personnages principaux sont peu communs et l’auteur dresse d’eux des portraits saisissants. Boyer, la soixantaine vigoureuse, est un pervers dans le déni. Il n’est pas coupable de ses crimes, il a été malchanceux avec les femmes. Rien n’est de sa faute, ce sont les circonstances, toujours malheureuses, qui l’ont mis dans le pétrin. Mais lui, il n’y est pour rien ! Personnage glaçant et délicieusement rédhibitoire, Boyer a des méthodes bien personnelles pour parvenir à son prouver son innocence, ce qui le rend crédible dans son raisonnement et ses comportements. Absolument rien ne nous le rend sympathique.
Germain est quant à lui un véritable anti-héros. Loin du cliché du flic alcoolique et dépressif, c’est un capitaine à peine trentenaire, un gringalet en costume qui manque d’autorité autant que d’assurance. Hanté par un doute permanent, plus cérébral que ses subordonnés, tiré à quatre épingle, l’intimidation par la violence et la brutalité ne sont pas sa tasse de thé. Son manque absolu de confiance en lui ne lui facilite pas la tâche. Un profil atypique qui enrichit l’intrigue au même titre que Boyer, coupable par nature, vicieux et foncièrement mauvais. Un duo improbable mais redoutablement efficace.
Si selon moi le principal intérêt tourne autour des deux protagonistes principaux et de leur psychologie, l’intrigue n’est pas en reste. Le suspens demeure mais si la révélation ultime n’est pas fracassante, on reste captivé par un déroulement progressif, très habile et non dénué de surprises.
Je mets rarement cinq à un premier roman, je me laisse toujours de la marge. Malgré des défauts, peu frappants en ce qui me concerne tant j’ai été happée par l’histoire, et quelques coquilles qui piquent les yeux, l’originalité des héros et leurs profils détaillés autant que crédibles m’ont bluffée. Mettre au premier plan un personnage aussi écœurant que détestable et un policier pas très charismatique, il fallait oser. Et tout cela fonctionne parfaitement. Germain est un personnage complexe et en devenir, on se prend à espérer le revoir en héros récurrent, tant les possibilités d’évolution sont infinies en ce qui le concerne.
2 remarques pertinentes pour “Je suis innocent”
Bonne critique
Sujet hautement casse-gueule surtout pour un premier roman
L’auteur a t’il d’autres projets ?
Oui !! 😀 Il envisage une suite, mais dans l’immédiat, il travaille actuellement sur un autre polar avec de nouveaux personnages. J’espère que des éditeurs vont se pencher sur son cas, c’est plus que prometteur !
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