- Auteur : Jake Hinkson
- Ma note :
- Lu : avril 2015
Geoffrey Webb est en train de se faire braquer sur un parking. Et cette situation lui convient bien, il en redemanderait même. À son agresseur, il propose un marché : empocher les trois mille dollars qui se trouvent dans son portefeuille, le dépouiller de tout s’il le faut, en échange de cinq heures de voiture jusqu’à Little Rock, en Arkansas. Webb a besoin de se confesser. Ce braquage et ce pistolet pointé sur lui, il les mérite. Et il est prêt à expliquer pourquoi.
Mon avis
Croisé par hasard dans le train qui nous conduisait à Lyon, Jake Hinkson m’était alors totalement inconnu. Son éditeur tout autant que sa bio ont attiré mon attention et j’ai cédé à la curiosité une fois aux Quais du Polar (oui, encore eux !).
L’Enfer de Church Street est un roman assez court que j’ai dévoré en un après-midi. Le récit démarre sur les chapeaux de roue, avec le braquage de Geoffery Webb, gros monsieur adipeux en quête de rédemption. Ou pas.
Le personnage de Webb, qui devient rapidement le narrateur principal est étonnant, il nous retrace son enfance difficile, sa rencontre avec Dieu, alors adolescent malingre et insipide, presque invisible, jusqu’à ce qu’il trouve sa voie, censée lui permettre de satisfaire ses ambitions, a priori modestes. À la fois cynique, faussement innocent, victime des circonstances, jeune homme naïf, mais finalement pas très scrupuleux si l’on considère sa faculté d’adaptation, Webb est indéfinissable, son degré de sincérité reste le plus grand mystère et l’on se surprend à avoir tour à tour de la sympathie pour lui, de la compassion, du mépris, et de l’horreur. L’humour est très présent, mais à un degré très subtil, et la religion en prend pour son grade. L’hypocrisie de cette dernière est mise en évidence, ainsi que son lien étroit avec le crime et le péché, les uns n’allant pas sans les autres. La personnalité de Webb reflète bien ce fonctionnement de la justification de tout et n’importe quoi, jusqu’à l’absurde. Apparemment pur et sans tache, occasionnellement troublé par quelques émois masculins, victime des tentations mais décidé à y succomber sans trop culpabilité et avec une certaine méthode, il se dédouane avec beaucoup de facilité et justifie même le pire, s’auto-persuadant de sa sincérité. Les voies du Seigneur étant, comme on le sait, impénétrables. Webb est vraiment un personnage riche, à part, aussi pathétique que détestable, à la fois victime et bourreau, sans trop de conscience et très opportuniste. L’occasion fait le larron !
L’auteur étant lui-même issu d’une famille baptiste et d’un père diacre, il a largement de quoi alimenter son œuvre littéraire. Heureusement, il s’en est sorti ! Un auteur à suivre de très près et dont j’attends les nouvelles parutions chez Gallmeister.

Photo © Carole Rannou (Olivia Lanchois) 2015
Une remarque pertinente pour “L’enfer de Church Street”
Si les rencontres commencent déjà dans le train alors il ne faudra pas hésiter à revenir 😉
Bises
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Pour la suite de mes lectures et autres déviances,
cela se passe désormais sur Ma Grosse PàL.