- Auteur : William Boyle
- Ma note :
- Lu : avril 2016
Gravesend, un quartier de Brooklyn pauvre peuplé de Russes et d’Italiens. Il y a 16 ans, Duncan, le frère aîné de Conway, a été renversé par une voiture alors qu’il tentait d’échapper à un gang de jeunes animés par la haine homophobe. Aujourd’hui, le chef du gang est en prison, mais il va bientôt sortir. Conway l’attend de pied ferme pour se venger. Mais sa vengeance va tourner court et Alessandra, son amour de jeunesse, va réapparaître dans le quartier… Désir, fantasme, désespérance et noirceur sont les maîtres mots de ce roman à la profonde humanité.
Mon avis
« Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir… » Voilà, qui illustre à merveille l’ambiance promise par la collection et la quatrième de couverture. Ce premier roman est saisissant de réalisme, l’auteur manie les descriptions avec une grande justesse, ses personnages sont presque palpables, l’ambiance est effectivement très noire, parfois glauque, et l’espoir y a bien peu de place.
La vengeance de Conway est le point central de l’intrigue, d’ailleurs nous entrons très rapidement dans le vif du sujet dès les premières lignes. Malgré quelques événements inattendus, le jeune homme ne se détourne pas de son but, même s’il est tout d’abord désarçonné par la réaction de celui qui a causé la mort de son frère. Autour de ce puissant fil conducteur gravitent des personnages finement ciselés, bien taillés, même si j’ai quelques réserves concernant les personnages féminins. La pauvre Stephanie, vierge à trente ans, vit encore chez sa mère, c’est véritable caricature de la moche, selon un point de vue masculin typiquement macho et tout aussi caricatural. Celui d’Alessandra est l’exact opposé : belle, bisexuelle, actrice, elle revient chez son père après des années passées en Californie. Je trouve ça un peu poussé, d’autant plus que ces deux personnages ne sont pas spécialement utiles à l’intrigue, surtout pas Alessandra, qui ne fait que passer finalement, et dont la présence ici et là n’influe en rien sur le développement de l’histoire. Alessandra, c’est quelques grammes de finesse dans un monde de brutes. On peut à la limite la voir comme une faible lueur d’espoir dans un océan de fatalisme et de tragédies. Car l’histoire suit son cours, Conway ne lâche rien, il n’a qu’un seul objectif et fait tout pour s’y tenir. Pour lui en seize ans, rien n’a changé, il n’a pas évolué socialement, il est obsédé par la mort de son frère, n’a pratiquement jamais quitté son quartier. Ray Boy Calabrese, le meurtrier, revient de prison moralement transformé, et n’est en rien celui auquel Conway s’attendait. Alessandra peine également à se fondre dans le décor, mais elle et Ray Boy sont bien les seuls à avoir vécu hors de Gravesend, et à avoir eu ainsi la possibilité de changer leur vision du monde.
On sent les personnages englués dans un fatalisme oppressant, on les voit s’enfoncer dans le drame comme si rien ne pouvait leur sortir la tête de l’eau, si bien que la conclusion, attendue, se révèle peut-être un peu too much avec le recul. Je dirais même que l’on frise l’invraisemblable avec les derniers coups de théâtre.
Malgré ces aspects qui m’ont un peu gênée, ce premier roman reste marquant par son ambiance et son réalisme, la plume se Boyle est efficace, il connaît le milieu qu’il décrit et le retranscrit magnifiquement.
Une remarque pertinente pour “Gravesend”
J’ai adoré ce livre 🙂
Les commentaires sont désormais fermés.
Pour la suite de mes lectures et autres déviances,
cela se passe désormais sur Ma Grosse PàL.