- Auteur : JK Rowling
- Ma note :
- Lu : octobre 2012
Bienvenue à Pagford, petite bourgade anglaise paisible et charmante : ses maisons cossues, son ancienne abbaye, sa place de marché pittoresque… et son lourd fardeau de secrets. Car derrière cette façade idyllique, Pagford est en proie aux tourmentes les plus violentes, et les conflits font rage sur tous les fronts, à la faveur de la mort soudaine de son plus éminent notable. Entre nantis et pauvres, enfants et parents, maris et femmes, ce sont des années de rancunes, de rancœurs, de haines et de mensonges, jusqu’alors soigneusement dissimulés, qui vont éclater au grand jour et, à l’occasion d’une élection municipale en apparence anodine, faire basculer Pagford dans la tragédie.
Mon avis
Je ne vous apprends rien, Une place à prendre est le nouveau roman de JK Rowling, qui nous revient avec une histoire pour adultes, loin du monde de balais et de chapeaux pointus de Harry Potter. C’est aussi un pavé de 682 pages en vrai papier, très épais, un peu grossier, et pas spécialement agréable, avec des marges larges et aérées, et une taille de police pour le 3e âge. De quoi justifier sans doute le prix aux yeux de l’acheteur, oui parce que 24 euros le pavé tout de même ! Mais ce n’est pas grave, ça nous fait 870 g à lire, soit 27,58 euros le kilo. Règle de base de l’édition : plus le livre est gros et lourd, plus le prix élevé semblera justifié aux yeux de la vache à lait du lecteur. Mon ancien patron appliquait cette règle, la qualité des textes en moins. Petit ou grand, le but d’un éditeur reste de vendre un maximum, mais en l’occurrence, et là c’est la cerise qui fait déborder le gâteau du vase, l’éditeur utilise un argument écolo en nous certifiant avoir utilisé du « papier à base de fibres certifiées », ce qui réduit l’empreinte carbone de ses livres. Et en utilisant moins de papier ça la réduirait pas encore plus ? Hein ? Je lis tellement peu de livres papier depuis 2010 que la chose m’a particulièrement outrée, choquée, enragée, révoltée, étonnée à la réception de cet engin. J’ai perdu l’habitude. Et on se plaint que les gens ne lisent pas. Comme c’est curieux ! D’un côté, vu la renommée de l’auteur et la gloutonnerie fébrile de ses millions de fans, qui sont autant d’exemplaires vendus de manière certaine, comment ne pas se montrer gourmand ? Ça s’appelle du marketing. Et je suis polie. Et ce n’est pas parce que j’ai reçu cet exemplaire en SP que je n’ai pas le droit de le dire. Donc à 24 euros un tas de feuilles et une couverture qui la ferait passer pour une intégrale du Petit dico d’aquí, je préfèrerais encore me rabattre sur l’epub, moins cher (quoique trop, encore !) et le confort en plus.
Bref, qu’en est-il de la qualité de l’œuvre de Rowling ? Faut-il être déçu, comme de nombreux fan(atiques) aveuglés qui s’attendaient à retrouver du Harry Potter (oui, le fan est parfois un peu demeuré, on a beau l’informer, il ne comprend pas toujours ce qu’on lui dit), ou bien est-ce un chef d’œuvre puisque de toute façon Rowling est un génie et que tout ce qu’elle écrit est automatiquement génial ?
J’ai pris le roman pour ce qu’il est, une étude mœurs dans un petit village anglais, écrit par un auteur dont j’aime déjà l’écriture. Il ne m’en fallait pas plus pour me titiller. On entre dans le vif du sujet très rapidement, avec le décès soudain de Barry Fairbrother. Dans la foulée, on découvre peu à peu une flopée de personnages hauts en couleur, évoluant dans un environnement où le paraître et la position sociale font toute la différence. Une exhaustive introduction des personnages nous immerge dans l’histoire. Rowling a pris sont temps, et un plaisir évident à la construction de Pagford et à la création de ses habitants. Elle nous plonge dans le quotidien des principaux protagonistes, et leur profusion pourrait sembler déconcertante, mais on accroche totalement ! Les liens entre eux nous sont décortiqués avec la plus grande précision, les relations parents-enfants ont une part importante, l’intrigue se met tranquillement en place tout en nous immisçant dans le quotidien des familles. Les différents personnages sont plus vrais que nature, nous avons vraiment là une galerie riche et surprenante, variée et fascinante. L’histoire de Pagford explique les motivations et les ambitions de certains de ses habitants. Rowling nous offre une histoire de rivalité(s) sur plusieurs niveaux. Pagford voudrait bien de débarrasser de ses quartiers pauvres et de ses habitants, mais c’est sans compter les efforts accomplis par Barry Fairbrother, ni la volonté de ses amis de poursuivre son œuvre. Une élection destinée à pourvoir son poste vacant pourrait changer ou détruire la vie de nombreux habitants.
Rowling ne se contente pas d’écrire un roman pour adultes, elle change radicalement de registre et ne nous épargne pas, car malgré quelques pointes d’humour ici et là, elle nous parle de misère, de drogue, de déchéance, mais aussi d’ambitions personnelles, de jalousie. La peur ou l’acceptation de l’autre est aussi un thème largement développé. Les enfants incompris ou mal aimés, les ados rebelles, les épouses déçues, les tragédies familiales liées à la drogue, l’abandon ou la misère, tout y est pour nous faire penser immédiatement à du Ken Loach. Rien de moins. Certaines scènes sont particulièrement sordides, les personnages incarnent le désespoir et la fatalité, la faiblesse ou le mal-être. Le rapport à l’autre, l’égoïsme, l’incompréhension constituent finalement le fond du roman. À mon sens Rowling réussit son « retour » en nous dépeignant le monde actuel à l’échelle d’une petite commune anglaise d’apparence irréprochable, avec le poids du passé et du mensonge. L’action n’est certes pas le centre du récit, le spectacle réside dans la construction méticuleuse des personnages et de leurs motivations. Un sacré bon moment quelque part entre Ken Loach et Balzac.
10 remarques pertinentes pour “Une place à prendre”
Hinhinhin, en ouvrant le lien, j’attendais de voir le petit smiley utilisé pour « ma note » ^^
« et une taille de police pour le 3e âge. » Oh, oui je m’en suis rendue compte lors de notre week-end en amoureuses.
» soit 27,58 euros le kilo. » huhu, j’adore ce genre d’info 😀
Voilà une chronique qui me fait dire qu’il va « falloir » que je le lise 😉
Oui oui oui !!! 😀
Je viens de le finir et j’ai beaucoup aimé. Une vision pas très folichonne de la société mais très réaliste. Elle a réussi à se renouveler.
Moi ta chronique me fait dire, va falloir que je le reprenne.
Plusieurs cop’s l’ont lu et adoré…moi j’ai lu les 50 premières pages mais Zzzzzzzzz j’ai trouvé cela trop lent pour moi. Ce n’était p’tet pas le bon moment. Du coup, j’ai promis de lui donner une 2è chance 🙂
Oui, et dans un genre moins léger, ce qui peut choquer les plus attachés à Harry Potter :p
C’est sûr qu’il ne faut pas s’attendre à de l’action pure et à du spectaculaire, ça reste une comédie de mœurs, voire une tragédie de mœurs ! 😀
Suis plongée dedans, avec un avis plutôt mitigé… mais j’adore ton billet !
Terminé depuis peu et j’au vraiment beaucoup aimé. Différent, déroutant par moments mais accrocheur pour la vision pas très douce de la société. À lire.
Moi, je l’ai lu en ebook… et, comme toi, j’ai pas dépensé 24€. Pour avoir feuilleté le « vrai » livre, je suis assez d’accord avec ton premier paragraphe !
Sinon, j’ai été déçue… à tel point que je n’ai pas fini le livre. J’ai été perdue parmi dans les personnages et le style d’écriture ne m’a pas plu… Bref, j’ai eu la sensation que JK Rowling voulait en faire trop pour se détacher de Harry Potter.
En ebook c’est clairement mieux, mes bras m’en remercient :p
Je n’ai pas eu la sensation qu’elle en faisait trop, mais qu’elle se faisait plaisir à s’adresser à des adultes, avec la profondeur requise, j’ai beau avoir adoré HP qui à mon sens était loin d’être « enfantin », je suis rassurée de voir qu’elle peut changer de registre avec autant de maîtrise, elle est passée à un autre niveau là, ça rigole plus :p
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