- Auteur : Anne Bourrel
- Ma note :
- Lu : mai 2017
Au Gran Madam’s, bar à filles de La Jonquera, Virginie est Bégonia Mars. Là-bas, elle enchaîne les passes sans broncher. Au-delà de la fatigue, au-delà du dégoût. Les coups de Ludovic, le Boss, ne la blessent pas davantage que les clients de passage. Et lorsque celui-ci laisse un homme mort à la frontière, elle le suit dans sa fuite, avec la même passivité…
Une vieille Dacia. La route qui défile sous le soleil brûlant d’août. Puis un visage d’adolescente, un peu grosse, un peu perdue, un peu fugueuse, qui va faire prendre à leur cavale un tour inattendu…
mon avis
Ravie ma découverte de l’auteur avec L’invention de la neige, j’ai enchaîné avec son précédent roman, Gran Madam’s. Si vous ne connaissez pas Anne Bourrel, je vous recommande non seulement de la lire, mais de la lire dans l’ordre. Il y a des parallèles flagrants d’un livre à l’autre, et surtout, un personnage commun. Mais en dehors de ça, les deux romans sont indépendants. Ou pas, peut-être que l’auteur a une idée derrière la tête…
Gran Madam’s est une maison close de la Jonquera, et elle existe ! Je ne connais pas cette partie-là de la ville mais le réalisme des descriptions des parkings de camions et des prostituées postées sur le bord de la route à l’entrée de la Jonquera ne fait pas de doute. C’est même assez glaçant. La première partie de la cavale de Bégonia, Ludovic et Le Chinois se déroule dans des lieux que je connais bien, et je ne passerai plus par le Col du Perthus sans penser à ce roman. Notons une grosse bévue/mélange de pinceaux lorsque le trio traverse les Albères en étant déjà dans l’Aude. Stupeur dans mon cœur ! J’invite donc le lecteur à rectifier de lui-même et à lire « Les Corbières », et non les Albères. Non mais des fois !
C’est donc dans l’Aude que nos assassins vont faire une pause au gré d’une rencontre inattendue. On ne saura rien de ce qui les a poussés à commettre ce crime, ce n’est pas le sujet. Leur halte imprévue à Capendu, petit village des Corbières, à mi-chemin entre Lézignan et Carcassonne, va leur réserver quelques surprises. Accueillis par un couple qui gère une station service, nos fuyards se laissent aller à sympathiser avec leurs hôtes. Le temps semble s’être arrêté, leur projet de fuite est mis en suspens. L’été est torride, l’atmosphère est étouffante, l’action du début du récit laisse place à une ambiance étrange et langoureuse. L’auteur ne traite pas vraiment les relations entre Bégonia et son Boss, le silence qui pèse entre eux en dit long, ils partagent un secret dont le lecteur ne saura finalement pas grand-chose. L’auteur plante ses personnages dans une ambiance, un genre huis-clos suintant qui n’incite pas à l’action. L’invention de la neige et Gran madam’s ont beaucoup en commun : un style efficace, des personnages pas forcément sympathiques et parfois ambigus, une situation dominée par un froid ou une chaleur inhabituels, un lieu précis où les protagonistes sont plus ou moins bloqués, la réaction de chacun face à un état de fait plus subi que choisi. Sans parler du personnage secondaire commun aux deux romans et du dénouement aussi brutal qu’inattendu. Chez Anne Bourrel, c’est une lente et subtile mise en situation, le calme avant la tempête.
Les commentaires sont désormais fermés.
Pour la suite de mes lectures et autres déviances,
cela se passe désormais sur Ma Grosse PàL.