- Auteur : Albert Sánchez Piñol
- Ma note :
- Lu : novembre 2008
Sur un îlot perdu de l’Atlantique sud, deux hommes barricadés dans un phare repoussent les assauts de créatures à la peau froide. Ils sont frères par la seule force de la mitraille, tant l’extravagante culture humaniste de l’un le dispute au pragmatisme obtus de l’autre. Mais une sirène aux yeux d’opale ébranle leur solidarité belliqueuse. Comme les grands romanciers du XIXe siècle dont il est nourri, l’auteur de La Peau froide mêle aventure, suspense et fantastique pour éclairer les contradictions humaines. Opposant civilisation et barbarie, raison et passion, lumière et obscurité, ce roman rappelle que, depuis la nuit des temps, c’est la peur de l’autre-plutôt que l’autre lui-même-qui constitue la plus dangereuse des menaces, le plus monstrueux des ennemis.
Mon avis
AAAAAAAAAAH !!
Ceci est un cri d’extase. Cela devrait suffire à donner une idée de l’effet que m’a fait La peau froide mais puisque nous sommes dans un lieu désormais distingué (oui, faut bien coller à la nouvelle image classieuse de ce blog). je vais donc devoir m’exprimer de manière civilisée.
De prime abord, le sujet m’emballait grave sa race. Et une fois le livre entamé, je fus happée par l’ambiance et le cadre angoissant de cette île perdue au milieu de nulle part. Le personnage du narrateur débarque innocemment sur l’île, prêt à y vivre une année entière, avec des raisons de fuir la civilisation qui lui sont propres et qu’il évoque juste assez pour se faire une idée, et point trop pour ne pas digresser. Donc, le narrateur s’aperçoit vite que tout ne tourne pas rond sur l’île. Son seul voisin, une espèce de brute aux allures de psychopathe, ne va pas s’empresser de faire sa connaissance malgré l’hostilité environnemental qu’ils partagent dorénavant. Le narrateur, à peine installé dans sa maison de climatologue, va devoir subir les attaques cauchemardesques de monstres aquatiques digne d’un délire lovecraftien. Confronté à la dure réalité de l’île, son unique objectif sera de survivre aux assauts répétés et hargneux des bestioles à la peau froide en attendant le retour du bateau supposé le récupérer l’année suivante. Par la force des choses et après un certain nombre d’événements, le narrateur et la brute vont finir par s’allier.
Réfugiés dans le phare, seul abri face à l’invasion meurtrière venue du fond des océans, les deux hommes, que pas mal de choses opposent, vont devoir cohabiter et lutter pour leur survie. Leur entente ne sera possible que dans une alliance contre les monstres, une alliance pour survivre. Batís Caffó, homme mystérieux un brin primaire mais néanmoins favorisé par son expérience face aux monstres, a tout ou presque du néandertalien. La description physique que nous en fait le narrateur le rapproche de la bête, ainsi que sa psychologie rigide. Le narrateur, plus subtil dans ses raisonnements et réflexions, évoluera de manière différente face aux bestioles.
ATTENTION SPOILER: Clique si tu oses => | Même pas peur !> |
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Récit d’aventures et d’horreur, ce huis-clos est aussi une réflexion sur l’Autre, sur l’étranger. Les réactions des deux héros ne diffèrent pas des envahisseurs coloniaux qui ont parsemé l’Histoire et anéanti ou asservi bon nombre de civilisations et de cultures dont l’Humanité n’était pas reconnue par leurs envahisseurs blancs et soit-disant civilisés. La réaction première étant de réfuter une quelconque Humanité, on attaque, on détruit, on s’approprie et dans le meilleur des cas (ou le pire !) on évangélise. Dans toutes les situations, on s’impose, par la violence de préférence, pour montrer qui est le maître, on évite le dialogue (les animaux ne dialoguent pas, voyons !).
Dans La peau froide, les envahisseurs ne sont que deux, et ne se voient pas comme tels. Ils débarquent assez innocemment sur l’île déserte, pour accomplir un travail, pour fuir la civilisation, pour des tas de raisons. Leur terreur face à une nouveauté qu’ils ignoraient et n’auraient pu concevoir les pousse à une violence défensive certes, mais ne se posent pas la question du pourquoi. Le narrateur mettra lui-même beaucoup de temps à évoquer le fait que ces monstres se sentent sans doute envahis et agressés dans leur domaine et les comparera aux soldats coincés sur des champs de batailles qui luttent pour leur vie. Les survivants agglutinés sur les victimes avant de les emporter au fond de l’océan sont tout d’abord vus comme des cannibales se nourrissant de leur morts, puis comme des soldats emportant leurs blessés.
Tout étant une question de point de vue, de préjugés et d’ouverture à l’autre, ou pas.
En outre, le style est juste délicieux, raffiné mais pas trop, les mots sont justes et coulent tous seuls.
Inutile de préciser que je compte fermement lire les prochains livres de cet auteur, pour commencer Pandore au Congo, que l’on dit encore meilleur !
2 remarques pertinentes pour “La peau froide”
Je n'aurais pas mieux dit. Joli dessin qui ressemble étrangement à l'idée queje me suis faite des créatures ➡ J'ai surtout retenu l'ambiance qui se dégage du roman.
Je peux pas faire autrement que d'avoir envie de le lire…
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