- Auteur : Jean-Pierre Boudine
- Ma note :
- Lu : avril 2016
Dans son repaire situé quelque part à l’est de l’arc alpin, Robert Poinsot écrit. Il raconte la crise systémique dont il a été témoin : d’abord le salaire qui n’arrive pas, les gens qui retirent leurs économies, qui s’organisent pour trouver de quoi manger, puis qui doivent fuir la violence des grandes villes et éviter les pilleurs sur les principaux axes routiers.
Robert se souvient de sa fuite à Beauvais, de son séjour dans une communauté humaniste des bords de la mer Baltique et des événements qui l’ont ramené plus au sud, dans les Alpes.
Quelque part dans le récit de sa difficile survie se trouve peut-être la solution au paradoxe de Fermi, à cette célèbre énigme scientifique : dans un univers aussi vaste que le nôtre, l’espèce humaine ne peut pas être la seule douée d’intelligence ; alors où sont les autres, où sont les traces radio de leur existence ?
Jamais auparavant l’effondrement de notre civilisation ne fut décrit de façon plus réaliste.
Mon avis
Le paradoxe de Fermi est un court roman qui évoque la fin du monde sous un angle inhabituel. Ici point de catastrophe spectaculaire, de cataclysme, de peste galopante ou de bouton rouge enfoncé trop vite. Le narrateur, isolé quelque part dans les Alpes, décide de mettre sur papier les dernières années de l’Humanité, expliquant comme celle-ci a amorcé sa chute inéluctable sans quasiment sans rendre compte. Une crise économique comme tant d’autres commence par ébranler le monde entier, sans néanmoins laisser deviner les terribles conséquences à court terme : crise commerciale, crise énergétique, crises sociales, etc. La civilisation a atteint un degré d’évolution inédit, et la chute n’en est que plus brutale, laissant peu d’espoir pour un renouveau, même à long terme.
Le narrateur alterne les passages de journal intime où il relate son quotidien difficile avec des chapitres plus axés sur l’origine de la chute. On apprend comment il en est arrivé à choisir cet isolement dans les montagnes, dans le dénuement le plus complet, loin des hommes. Si ces derniers ne sont pas retombés à l’âge de pierre, ils n’en sont pas très loin, sans électricité ni sources d’énergie moderne, ils doivent réapprendre à produire des ressources vitales, mais en sont-ils encore capables ? J’ai souvent pensé à Ravage de Barjavel, l’homme privé de sa technologie tente de survivre dans la misère la plus totale, et la question de remonter la pente (ou non) en reproduisant les mêmes erreurs (ou non) se pose.
Les passages sur le paradoxe de Fermi lui-même, au travers de dialogues entre les personnages, donnent de quoi réfléchir, appréhender de telles théories, pas spécialement optimistes, dépasse un peu l’entendement du commun des mortels. On en sort songeur, fasciné, ébloui.
Le récit est très court, plus qu’un roman c’est une évocation de ce que pourrait être la fin de la civilisation, loin des interprétations habituelles. Le livre a été publié une première fois en 2002, puis revu et mis à jour par son auteur et il s’agit ici de la version publiée en 2015, tristement réaliste.
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