- Auteur : Sandrine Collette
- Ma note :
- Lu : mai 2016
Patagonie. Dans la steppe balayée de vents glacés, un tout petit garçon est poursuivi par trois cavaliers. Rattrapé, lancé de l’un à l’autre dans une course folle, il est jeté dans un buisson d’épineux.
Cet enfant, c’est Rafael, et les bourreaux sont ses frères aînés. Leur mère ne dit rien, murée dans un silence hostile depuis cette terrible nuit où leur ivrogne de père l’a frappée une fois de trop. Elle mène ses fils et son élevage d’une main inflexible, écrasant ses garçons de son indifférence. Alors, incroyablement seul, Rafael se réfugie auprès de son cheval et de son chien.
Dans ce monde qui meurt, où les petits élevages sont remplacés par d’immenses domaines, l’espoir semble hors de portée. Et pourtant, un jour, quelque chose va changer. Rafael parviendra-t-il à desserrer l’étau de terreur et de violence qui l’enchaîne à cette famille?
Mon avis
Et me voici à jour dans la découverte de l’œuvre de Sandrine Collette, avec pour finir un coup de cœur ! Il reste de la poussière nous transporte jusqu’en Patagonie, à croire que Collette raffole de contextes et de situations extrêmes. La Patagonie du roman est sèche, venteuse, pelée, loin de tout. La mise en situation annonce une atmosphère bien particulière. Et c’est peu de le dire. On comprend vite l’ambiance qui règne au sein de cette curieuse famille, avec le petit, martyrisé par ses aînés, une paire de jumeaux soudés et hargneux, le débile, totalement ignoré de tous et pourtant pas si « débile », et la Mère, indifférente au sort de sa progéniture.
La Mère, personnage sans nom dont la fonction se suffit à elle-même, gère ses quatre fils comme du bétail, travaillant du matin au soir, sans salaire, sans repos ni reconnaissance. Veuve, et à la tête d’une estancia isolée dans la pampa, elle n’a d’autre but que de survivre, et « éduque » ses fils dans la même optique. En dehors d’une expédition mensuelle à la ville, de quelques heures de jeu et de cuites, nulle distraction ne vient égayer la vie de la Mère. Et lorsque celle-ci perd l’un de ses fils au jeu, ce ne sont pour elle que des bras en moins, rien de plus. Ici, point de sentiments, les cœurs sont aussi arides que la terre, tout juste suffisante pour faire vivre le bétail.
Le style de Collette est toujours aussi marqué, reconnaissable, sec et direct, il trouve ici toute sa puissance, se mettant au service d’une histoire très noire, où l’espoir pointe parfois le bout de son nez, mais est rattrapé par la fatalité. Le rythme relativement lent du récit est en phase avec les grands espaces décrits, hostiles, sans fin, loin de tout, on prend le temps de chevaucher avec le petit Rafael, avec ses frères nés et dressés pour devenir gauchos. Malgré ce rythme apparemment lent, il n’y a pas de longueurs, on reste fasciné et hypnotisé par cette nature difficile et si bien décrite, par ces personnages au cœur vide, l’esprit monopolisé par l’idée de survie. Les relations affectives entre les protagonistes sont inexistantes, rien ne relie cette mère à ces fils, ni ces fils entre eux, à l’exception des aînés, dont la gémellité reste le seul lien affectif du roman. Un lien bien relatif, malgré tout. Les fils ont hérité du regard froid de la Mère sur le monde et la société, même si l’un d’eux découvre qu’une autre vie est possible, c’est le pessimisme et le fatalisme qui règnent. Élevés comme leur mère, à la dure, ils ne connaissent rien d’autre et sont conditionnés, formatés par une vie austère de travail incessant et de privations.
Il reste la poussière, c’est un roman social, un roman familial, une histoire sur la nature dans ce qu’elle a de plus aride et austère à offrir. C’est un peu Zola dans la pampa, et c’est superbe.
6 remarques pertinentes pour “Il reste la poussière”
C’est le seul livre que j’ai lu de l’auteure mais j’ai adoré moi aussi! Je te laisse ma chronique du roman, si ça t’intéresse: https://mypublicstuff.wordpress.com/2016/02/08/sp45-il-reste-la-poussiere-de-sandrine-collette/
Il ne faut pas hésiter à lire les autres ! Par contre comme c’est (à mon sens) le meilleur, la barre est haute ! 😀
Ah oui? Je serais quand même curieuse d’en lire un autre pour voir 😀
Le tout premier Des nœuds d’acier par exemple, brrrr! 😀 https://lectrice-heretique.com/category/auteurs/auteurs-en-c/collette-sandrine
Bon Zola est mon auteur préféré et la Patagonie mon endroit préféré… donc je suis convaincue! Merci!
Zola est mon chouchou aussi 😀 Ici c’est aussi glauque que chez les Rougon-Macquart, avec un superbe environnement bien austère. Ambiance !
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