- Auteur : Liu Cixin
- Ma note :
- Lu : octobre 2016
En pleine Révolution Culturelle, le pouvoir chinois construit une base militaire secrète destinée à abriter un programme de recherche de potentielles civilisations extra-terrestres. Ye Wenjie, une jeune astrophysicienne en cours de “rééducation” parvient à envoyer dans l’espace lointain un message contenant des informations sur la civilisation humaine. Ce signal est intercepté par les Trisolariens, qui s’apprêtent à abandonner leur planète-mère, située à quatre années-lumière de la Terre et menacée d’un effondrement gravitationnel provoqué par les mouvements chaotiques des trois soleils de son système. Ye Wenjie reçoit près de huit ans plus tard la réponse des Trisolariens. Choquée par les horreurs dont elle a été témoin durant la Révolution culturelle et ayant perdu toute foi dans l’homme, elle fournit secrètement aux Trisolariens les coordonnées du système solaire, dans l’espoir que ceux-ci viennent conquérir la Terre et réformer l’humanité. Dans quatre siècles, ils seront là…
Premier volume d’une trilogie culte, récompensé par le Hugo du meilleur roman en 2015, Le Problème à trois corps signale l’arrivée d’un auteur majeur sur la scène de la hard SF.
Mon avis
De la (hard) SF chinoise, voilà qui sort de l’ordinaire et qui pique la curiosité, à supposer que la quatrième de couverture, (qui en dit peut-être un peu trop certes mais pas plus que les anglo-saxonnes) ne suffise pas. Je ne me fie pas au prix remporté par ce roman, car si certains prix valent peut-être mieux que d’autres, par principe je n’en tiens pas compte.
Le contexte est du coup pour le moins original, et nous plonge dans la Révolution culturelle chinoise à la fin des années 60. De quoi s’apercevoir que l’on sait finalement peu de chose sur la période en dehors des grandes lignes. Dépaysement immédiat, donc. La jeune Ye Wenjie, scientifique prometteuse, voit sa carrière mise en suspens par les événements. Envoyée sur une base scientifique pour y être rééduquée en vue d’une réhabilitation hypothétique et lointaine, elle y fait des découvertes qui vont changer la face du monde. Mais pas tout de suite, car son rapport à l’Humanité a bien changé, et, ainsi dépourvue du moindre optimiste concernant ses congénères, elle prend des décisions irréversibles qui vont changer le cours de l’Histoire sur le très long terme.
L’auteur laisse de côté cette période et nous renvoie alors presque quarante ans plus, de nos jours, où d’étranges événements mettent en émoi la communauté scientifique internationale. Un chercheur en nanotechnologie est sollicité par des représentants de l’OTAN, de l’armée et j’en passe, pour infiltrer une organisation suspectée d’être mêlée à ces drames. Sa rencontre avec Ye Wenjie, près de quatre décennies après le premier contact, démarre un récit aux allures d’enquête policière, avec rebondissements, révélations et secrets bien gardés. Peu à peu, le cheminement qui a conduit Ye Wenjie à agir de telle manière se révèle.
L’aspect hard SF est indéniable, l’histoire tourne autour du et de ses conséquences sur l’évolution des Trisolariens, ainsi que d’autres notions de physiques ou d’informatiques plus ou moins accessibles par les non-scientifiques. Si cela peut paraître parfois un peu obscur, cela ne gêne en rien la lecture et la compréhension, mais accentue au contraire le sense of wonder qui habite déjà le roman. Pour contrebalancer le côté scientifique l’auteur aborde les thèmes du progrès technologique et de ses conséquences sur l’Humanité, du bon usage des sciences, du fanatisme régressif et du rejet du progrès par certaines populations dont le pessimisme annihile tout esprit critique. L’humanité en est là, à quatre siècles d’une invasion programmée, d’une colonisation massive et potentiellement fatale, à se remettre en question, à douter de ses acquis et de ses avancées scientifiques.
Le roman de Liu Cixin a de l’envergure, et laisse présager une suite d’autant plus grandiose que les personnages eux-mêmes sont largement développés au sein de le grande Histoire. Celle-ci est conditionnée par le contexte politique, historique, mais aussi par le personnage de Ye Wenjie, dont les choix découlent de son vécu, de ses expériences, et de sa perception du monde. On y aborde aussi d’autres comportements possibles face à un tel événement. Comment réagirions-nous, individuellement ou collectivement, à un contact extra-terrestre, dans quel camp serions-nous ? La raison, la philosophie, nos aspirations personnelles influenceraient-elles nos choix ?
Si ce premier volume ne traite que du premier contact et des ses conséquences immédiates, il annonce une intrigue vaste, étalée sur plusieurs siècles, et les dernières pages laissent présager un développement conséquent sur les Trisolariens, étrange civilisation aux abois. Je suis plus que curieuse de voir le monde que propose Liu Cixin dans les volumes suivants, car on peut supposer que la Terre et l’Humanité vont pendre un drôle de tournant. Un sacré premier volume donc, qui laisse le lecteur avide de connaître la suite.
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