- Auteur : Alicia Gimenez Bartlett
- Ma note :
- Lu : mai 2015
L’inspectrice Petra Delicado se voit confier la tâche peu valorisante d’enquêter sur le meurtre d’un inconnu roué de coups dans une ruelle sordide de Barcelone. Personne ne semblait connaître la victime, personne n’est venu identifier son corps. L’unique témoin du drame est son chien, un témoin muet que Petra va s’efforcer de faire « parler ». Avec obstination, elle poursuit une enquête dont tout le monde semble se désintéresser. Elle croisera, outre de nombreux chiens et éleveurs de chiens, des femmes qui ne laisseront pas insensible son adjoint Garzon.
Dans cette deuxième aventure du tandem barcelonais, Alicia Gimenez Bartlett explore la réalité sociale, mais aussi les relations amoureuses, sur un mode ironique et désenchanté.
mon avis
Second volume des enquêtes de Petra Delicado, Le jour des chiens est tout aussi réussi que l’entrée en matière de Rites de mort. Nous retrouvons notre duo, toujours aussi improbable, face à une drôle d’enquête. On retrouve ici toutes les qualités du premier volume, avec une part encore plus importante accordée à la vie privée de nos deux héros. Les dialogues sont toujours aussi savoureux, parfois surréalistes, et la répartie de Petra toujours percutante.
Pour se faire plaisir un petit extrait réjouissant qui donne le ton :
— Vous devez faire une bonne provision de certains produits de base : sucre, riz, huile, farine… ils ne s’achètent pas toutes les semaines. Quelle raison un homme comme [***] pourrait-il avoir pour tuer [***] ?
— Je ne sais pas, les savants ont la réputation d’être excentriques. Et la levure, inspectrice, j’achète de la levure ?
— Non ! Bon sang, pourquoi voulez-vous de la levure ?
— Eh bien, je ne sais pas, pour faire du pain ! Et si [***] savait quelque chose sur [***] et l’avait menacé de le révéler ? Dites, je prends des macaronis, non ?
— Achetez-en si vous aimez ça. Non, ça ne me semble pas vraisemblable. Et puis, s’il était coupable, nous téléphoner serait vraiment dévoiler ses cartes. Mettez ces boîtes de tomate en conserve dans le Caddie.
— Pour les macaronis, je parie ?
— Parfaitement bien raisonné, vous commencez à apprendre.
— Moi, de toute façon, je ne l’écarterais pas comme suspect éventuel. Dites, inspectrice, et le gruyère râpé avec les macaronis ?
— Bon sang, Garzón, vous m’impressionnez !
Nous passâmes au rayon des denrées périssables. Je lui donnai une brève explication qu’il puisse comprendre.
— Voilà, il y a des choses que vous devrez congeler. Faites-le en mettant une étiquette indiquant le contenu du sachet et la date. Si vous avez besoin de légumes, achetez-les déjà congelés ; c’est plus facile et ils sont de bonne qualité.
— D’accord, où sont les salades congelées ? J’aime manger une bonne salade de temps en temps.
— Il n’y a pas de salades congelées, inspecteur, et vous ne pouvez pas non plus les congeler fraîches ; ne cherchez pas dans les boîtes de conserve, cela n’existe pas non plus. Pour manger de la laitue, il faut l’acheter le jour même.
Il me regarda d’un air déçu.
— Je crois que je n’y arriverai jamais, c’est trop compliqué.
— Ne dites pas de bêtises. Vous voyez ces filets de bœuf ? Ayez-en toujours un ou deux kilos prêts à décongeler. Comme vous vivez seul, il vaudra mieux les envelopper un par un. Et ne me dites pas que c’est trop compliqué !
Il observait les morceaux de viande rouge comme s’il s’était agi de formules d’Einstein.
— Ils ont fini d’établir la carte informatique des vols ?
— Il manque la liste de Rescat Dog.
— Je les avais oubliés. Cet après-midi, il faudra y passer.
— J’ai appelé plusieurs fois et jamais personne ne décrochait. Un répondeur automatique prenait les messages.
— Rappelez-moi d’y passer. Maintenant on va au rayon des produits d’entretien.
— Quoi ? Des produits d’entretien, en plus ?
L’intrigue en elle-même est encore une fois bien maîtrisée, même si j’ai eu un petit doute en cours de route, l’auteur sait provoquer la surprise et la stupeur. Nos deux héros ne sont pas épargnés par les aléas de leur vie privée, très présente, voire envahissante, mais ce mélange n’est pas pour me déplaire, puisqu’il est vecteur de légèreté (ou pas) et de traits d’humour toujours bienvenus. Une série à poursuivre avec délectation !
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