- Auteur : Ian McDonald
- Ma note :
- Lu : mars 2018
2110.
Sur une Lune où tout se vend, où tout s’achète, jusqu’aux sels minéraux contenus dans votre urine, et où la mort peut survenir à peu près à n’importe quel moment, Adrianna Corta est la dirigeante du plus récent des cinq «Dragons», ces familles à couteaux tirés qui règnent sur les colonies lunaires. Elle doit l’ascension météoritique de son organisation au commerce de l’Hélium-3. Mais Corta-Hélio possède de nombreux ennemis, et si Adrianna, au crépuscule de sa vie, veut léguer quelque chose à ses cinq enfants, il lui faudra se battre, et en retour ils devront se battre pour elle…
Car sur la Lune, ce nouveau Far West en pleine ruée vers l’or, tous les coups sont permis.
Développé en série télé par CBS, souvent comparé à Game of Thrones à cause de la brutalité de ses intrigues, récompensé par le Gaylactic Spectrum Award 2016, Luna est le premier volume d’une trilogie.
Sur la Lune, deux ans après les événements qui ont précipité la chute de la famille Corta, les Mackenzie se sont approprié les restes de leur entreprise. Il n’y a donc plus que quatre «Dragons», ces consortiums familiaux qui se partagent l’exploitation des ressources lunaires et, donc, le pouvoir. Pourtant, les Mackenzie se déchirent sur les cadavres encore frais de leurs ennemis de toujours. Les Sun continuent, discrètement, à élaborer des plans visant à affaiblir leurs adversaires. Les Vorontsov vendent toujours leurs indispensables services au plus offrant. Et les Asamoah tentent tant bien que mal de préserver leur neutralité de façade. Mais le statu quo, même sous gravité réduite, n’est jamais acquis. D’autant que les rares survivants de la famille Corta – blessés, en fuite ou sous la protection d’autres Dragons – n’ont pas dit leur dernier mot.
Avec le deuxième tome de sa trilogie, Ian McDonald continue, sans temps mort, l’exploration minutieuse de sa colonie lunaire, nouveau Far West où tous les coups (bas) sont permis.
Mon avis
Ayant raté mon tour lors de la parution du tome 1, Luna : Nouvelle lune l’an dernier chez Denoël, je me suis rattrapée avec le tome 2, Lune du loup. Heureusement, j’ai pu faire entrer le premier tome dans ma PAL dans l’intervalle. J’ai donc pu lire les deux à la suite, traduits par Gilles Goullet.
Colonie lunaire
Au XXIIe siècle, la Lune est devenue une colonie industrielle puissante. Cinq familles se sont imposées comme les vraies dirigeantes de ce nouveau territoire. Ces cinq Dragons ont réinventé une société indépendante de la Terre, dépourvue de lois, de préjugés moraux, des carcans sociétaux qui régissent la vie des terriens. Sur la Lune, pas de lois, mais uniquement des contrats, âprement négiociés. Conflits de tout ordre, mariages, alliances et différends, rien n’échappent aux contrats.
Adrianna Corta est la matriarche, fondatrice de Corta Hélio, entreprise qui se consacre à l’extraction de l’hélium comme source d’énergie. Alors jeune arrivante, Adrianna a bâti son empire cinquante ans plut tôt, rejoignant ainsi le cercle fermé des « dragons ». Ses confessions sous forme de flashbacks ponctuent un récit dense, aux multiples points de vue, et nous révèlent avec parcimonie un but caché. Un objectif sur le long terme, connu d’elle seule, et qui restera en arrière-plan tout au long de ces deux premiers volumes.
une société cosmopolite réinventée
Nous faisons donc la connaissance de la famille Corta, ses coutumes et mœurs familiales, différentes des autres familles, d’origines diverses. Ces cinq dynasties sont issues de cultures variées, les Corta viennent du Brésil, les Sun de Chine, les Mackenzie sont australiens, les Asamoah ghanéens, et les Vorontsov sont russes. Si des alliances « naturelles » existent, d’autres sont contractées par souci de préserver une paix et une entente bien fragiles. Des inimitiés existent donc, tempérées par des mariages d’intérêt. Cet équilibre précaire est au centre de l’intrigue, peuplée de personnages hauts en couleur.
La narration n’est pas d’un abord facile. L’auteur est avare d’explication, il nous expose un monde nouveau, avec ses particularités, son vocabulaire cosmopolite, ses coutumes. Tout ceci, de même que le nombre de personnages, laisse le lecteur un peu perplexe. Le découpage est également déroutant de par son rytme saccadé. On passe facilement d’un point de vue à l’autre, d’une scène a priori anecdotique à l’autre. Le fil conducteur semble ainsi mis souvent de côté .
La lune se mérite !
Malgré cette première difficulté, la lecture devient rapidement immersive, on apprend à connaître les nombreux personnages, leurs motivations, leurs caractères. Le puzzle se met en place, l’action se développe autour de protagonistes calculateurs et sans scrupules. Vengeances, jalousie, coups de théâtre et catastrophes, tout y est. L’auteur imagine une société inédite, enfermée dans des infrastructures lunaires, avec ses contraintes, ses dangers permanents, mais pourvue d’une capacité d’adaptation hors normes. Pour un nouvel arrivant terrien, la lune c’est l’Enfer, alors qu’un homme de la lune ne pourrait pas survivre sur Terre, son corps étant inadapté à la gravité terrestre. L’aspect Hard SF est très présent mais subtil, l’auteur a tenu compte des contraines et des réalités de la physique pour raconter son histoire. Nul besoin d’entrer dans des exposés lourds et abscons.
Luna regorge d’idées, de concepts et d’inventions à tous les niveaux : politique, économie, société, famille, sexualité. L’action se met en place autour d’une intrigue qui évolue de manière détournée, non linéaire. Digressions et scènes secondaires diluent un récit pourtant dense, et renforcent le réalisme du propos. Les personnages n’en sont que plus vrais, plus attachants, ou détestables. L’environnement lunaire contribue à exacerber la fragilité de cette société qui dépend des relations entre les cinq familles. Le moindre différend peut se transformer en guerre ouverte et mettre en péril la colonie.
Pour conclure
Je ne connaissais pas Ian McDonald avant de lire Luna, la découverte me ravit ! Nul doute que j’attaquerai un autre de ses romans sous peu. Le troisième et dernier tome étant prévu pour 2019, il va donc falloir s’armer de patience pour le grand final.
Les commentaires sont désormais fermés.
Pour la suite de mes lectures et autres déviances,
cela se passe désormais sur Okenwillow.